Un jour au petit matin, je sortis de mon chalet en direction du bois. L’atmosphère ambiante si pure mettait en évidence la splendeur de la nature. La rosée ornant les fougères ressemblait à de petites perles transparentes. Les feuilles des arbres tombaient en douceur, et virevoltaient dans les airs, effectuant d’harmonieuses volutes colorées.
Un rayon de soleil filtrait à travers les branches matinales. L’air était délicieusement humide et frais, conférant aux senteurs de l’aurore une soudaine majesté.
Le soleil entama sa lente ascension dans le ciel. Je le distinguais à peine à travers les branches qui ornaient le chemin que j’avais emprunté. Il m’obligea cependant à cligner les yeux que j’avais encore endormis. Les feuilles commençaient à joncher le sol, le parcheminant de chaudes couleurs automnales. Je les respirais, je humais ces senteurs qui me rappelaient mes longues promenades dans la forêt que nous faisions ensemble. Je me souvenais de ces moments passés en quête de girolles, bolets ou autres champignons comestibles qui viendraient orner notre panier gourmand.
Un vent léger se mit à agiter les branches des arbres qui libérèrent des gouttes d’humidité accumulées pendant la nuit. Dans leur chute, elles émirent un clapotis sautillant qui me réveilla quelque peu. Le soleil filtrait désormais timidement ses rayons, empêché dans son éclat par des taillis hauts qui s’avéraient de plus en plus denses en cet endroit de la forêt.
Au bout du sentier que j’avais emprunté à dessein, je me retrouvai nez à nez avec une cascade qui gazouillait fébrilement dans le silence matinal.
Tu surgis comme par magie au milieu de cette paisible atmosphère automnale. Tu étais là, magnifique, dressé devant moi dans ton habit de lumière à me contempler. J’étais échevelée et vêtue sobrement pour la circonstance, mais tu me trouvas malgré tout aussi belle que dans tes songes. Tu me tendis les bras. Je courus m’y blottir, enfin !
La forêt ayant accueilli nos retrouvailles tant attendues s’effaça. Nous ne savions plus où nous étions. Le soleil brillait-il ? Faisait-il encore jour, ou bien la nuit avait-elle tout envahi ? Nous nous moquions du monde ambiant, nous ignorions sa présence et défions son existence. Nous partîmes ensemble au royaume des rêves et de l’oubli. La Terre s’arrêta de tourner. Une joie intense enivra nos cœurs qui s’enfuirent dans une indicible harmonie recouvrée.
Je crois bien n’être jamais vraiment redescendue seule en cet endroit où tu m’attendais secrètement, caché derrière le bel écran qu’offrait cette cascade. Mon âme accompagne désormais la tienne. Nous voguons tous deux de concert sur des nuages transcendants, distribuant de temps à autre quelques gouttes de bonheur matinal aux jeunes amoureux qui aspirent à se retrouver par-delà les turpitudes de ce monde hostile. Le moment venu, nous parcheminons les sentiers forestiers de perles de rosée fraîcheur, annonce de senteurs automnales colorées aux teintes chaudes des retrouvailles espérées. Les feuilles des arbres jonchant le sol forment un tapis accueillant qui étouffe nos pas discrets et imaginaires. Nous allons rejoindre la petite cascade gazouillante et attendons… Le miracle d’un jour nouveau se produit immanquablement. Des petites étincelles de joie et de vie s’allument dans les yeux désespérés des amoureux jusqu’alors séparés.
L’amour est là, accomplissant son miracle quotidien.
© Monique-Marie Ihry – juin 2009 -
(Extrait du recueil de poésie » Rendez-vous manqués » paru en mai 2011)