Dans le Jardin des mots

Archive pour le 30 avril, 2023

Carapace / Coraza

Posté : 30 avril, 2023 @ 11:40 dans Extraits de recueils de poésie de l'auteure, féminisme, Poemas en español, poèmes d'amour, Poèmes en français, Réflexions diverses, sensualité | Pas de commentaires »

AGRESSION 50 50

CARAPACE

 

Je suis en apparence nue,

mais cependant vêtue

d’une solide CARAPACE.

Ce que tu ignores,

c’est qu’insister à la porte de mon sexe

ne te mènera à rien !

Tu t’évertues à prendre ton dû

et je dois

− au nom de ma condition de femme –

me laisser faire sans concession

entre     deux

coups,

entre     deux

injures.

 

IVROGNE !

 

continue à frapper de la sorte,

JAMAIS   je ne te donnerai la clef

de mon âme.

Il n’est plus de passion

ni de flamme,

j’ai troqué mon corset

de femme soumise

contre une CARAPACE

que NUL et surtout TOI

 

ne pourra JAMAIS PLUS

 

ébranler !

 

©  Monique-Marie Ihry    -  20 juillet 2017  -

(huile sur toile de l’auteure intitulée « Agression » 50 x 50 (2002)

*

CORAZA

 

 

Me crees desnuda,

pero en realidad estoy vestida

de una indestructible coraza.

Lo que ignoras,

es que insistir en la puerta de mi sexo

¡no te llevará a ninguna parte!

Te afanas en obtener lo que TÚ necesitas

y debo

‒ en nombre de mi condición femenina –

someterme sin concesiones

entre       dos

golpes,

entre       dos

insultos.

 

BORRACHÓN,

 

sigue golpeando de esta manera,

NUNCA te daré la llave

de mi alma.

Ya no hay pasión,

ni llama,

he cambiado mi corsé

de mujer sumisa

por una CORAZA

que NADIE ‒ y especialmente TÚ ‒

 

¡NUNCA MÁS podrá de nuevo

 

quebrantar!

 

©  Monique-Marie Ihry    -  13.11.2020 -

Poème « Au chant du cygne » commenté par le Pr Mohamed Salah Ben Amor

Posté : 30 avril, 2023 @ 10:56 dans Extraits de recueils de poésie de l'auteure, Poèmes en français, Poèmes traduits en arabe, Prix de poésie | Pas de commentaires »

PARIS II La mélancolie du cygne

Au chant du cygne

 

I

 

La mort, tel un oiseau de proie

Déploya ses ailes immenses.

Ses serres avec véhémence

Griffèrent l’harmonie de soie

Recouvrant les vagues azur

D’ombres argentées, lumineuses.

De ses longues ailes flâneuses

L’oiseau de mort au regard dur

Fendit le bleu miroir de l’onde,

Puis rebondit d’un coup de rein

Vers les hauts cieux faits d’airain

Laissant mon âme vagabonde

Voguer, pour un temps seulement,

Un temps de répit sur la vie,

Rien qu’un court instant de survie

Avant la nuit, fatalement…

 

II

 

L’oiseau de mort revint frôlant

Ma barque frileuse amarrée.

Je le regardai, effarée,

Verser son filet nonchalant

Sur mes espérances ultimes.

La mer eut des relents de sang,

Puis l’onde se grisa d’encens

En m’attirant dans ses abîmes…

 

III

 

Dans l’antre de la mer, enfin

Je crus entrevoir la lumière ;

Elle me parut familière.

J’étais à deux doigts de la fin

C’était si doux dans l’onde claire.

Un tapis d’algues m’accueillait,

La mort sereine me cueillait

Telle la fleur abécédaire

D’un dictionnaire des décès.

J’eus soudain très envie de vivre,

Me libérai d’un élan ivre

D’entre les mailles du corset.

 

IV

 

Une fois parvenue au jour,

Libérée du carcan liquide

Orchestré par la mort, son vide,

J’osai espérer un amour

Qui viendrait orchestrer mon cœur.

Je priai pour que cette vie

Vogue au-delà de la survie

Et verse enfin dans le bonheur !

 

                       V

 

Dans le ciel scintillait la Lune

Entourée d’astres lumineux,

Tous les nuages charbonneux

Avaient déserté la nuit brune.

La mort rangeait ses longs filets

Sur le sable grisé de cendre.

Une brise légère et tendre

Chantonnait au soir ses couplets,

Refrain chaleureux sur la toile

De l’univers. Je m’endormis

D’un sommeil aux rêves ravis,

Loin de la mort et de son voile…

 

VI

 

Je m’éveillai sur une plage

Baignée d’un soleil chaleureux.

Les grands pins voguaient bienheureux

Entre les vagues d’un nuage.

Le ciel soudain se fit azur,

Un cygne écrivit un long vers,

Un signe inscrit sur l’univers

Pour louer la vie, un futur…

 

VII

 

Le cygne fendait l’eau, majestueux et beau,

Dans le crépuscule s’éveillaient les étoiles

Dissipant peu à peu les brumes de leur voile,

L’ange dans les cieux semblait bénir les flots.

 

Au loin l’on entendait des chevaux les sabots.

Le bruit de leur course dans le soir automnal

Finit par agonir de ses pas en rafale

Dans le silence bleu d’une nuit sans tombeaux.

 

Le cygne blanc nageait au rythme de la lune

Dont le chant bienveillant aux notes opportunes

Charmait l’onde sereine et comblait d’infini

 

Le monde s’endormait dans la blonde harmonie

D’une paix recouvrée, remettait à demain

L’enfer de la guerre, ses fers, son venin…

 

© Monique-Marie Ihry

Poème extrait du recueil de poésie Cueillir les roses de l’oubli, Éditions Mille-Poètes en Méditerranée, Narbonne, 2014

 

* * *

La première remarque qui se dégage de ce poème autobiographique écrit à la première personne, est que son auteure, habituée formellement aux poèmes de longueur moyenne, a éprouvé cette fois le besoin d’utiliser le poème très long (78 vers). La cause à l’origine de ce changement est qu’elle tente de faire un bilan de son existence d’adulte ; celle-ci se compose, selon ses dires, de deux étapes distinctes. La première était marquée par l’infortune et la cruauté du destin. Dans la seconde qui se poursuit au présent, elle a trouvé la quiétude et le bonheur. Cette division nette du parcours de la locutrice l’a aidée à bien traiter son texte esthétiquement et ce, en usant simultanément de deux procédés majeurs : la technique de la temporalité et la métaphorisation. Ainsi, pour mettre en évidence l’atrocité de la première étape et bien la séparer de la seconde, elle a utilisé le symbole de l’oiseau de mort et le flash-back, tandis que dans la deuxième étape qu’elle présente comme empreinte de bonheur, elle a choisi le symbole contraire du cygne et le temps présent.

La seconde remarque à faire est que tous les événements relatés ici se passent à l’intérieur de la locutrice, d’où le caractère purement psychologique du poème qui offre au lecteur une sorte d’auto-analyse introspective plongeant, d’abord, dans la mémoire pour réveiller des souvenirs obscurs douloureux formant un véritable cauchemar, ensuite dans l’esprit éveillé pour décrire les sentiments de bien-être et de sérénité que l’auteure éprouve au temps de l’énonciation.

Un poème magistral qui retrace admirablement une bonne partie de l’itinéraire individuel de la poétesse et qui séduit par l’originalité de ses images et la charge émotionnelle de ses mots.

 

Mohamed Salah Ben Amor

 

 couvlivreceuillirlesrosesdeloubli

 

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